Enfant déjà, j’ai toujours aimé jouer (et surtout gagner, j’avoue), mais comme tout grand dyslexique je n’ai jamais trop pris mon pied en parcourant les livrets de règles, j’avais la flemme de lire, puis de relire parce que j’avais forcément compris quelque chose de travers. Bref, pour que je joue à un jeu, il valait mieux me l’expliquer, et que ce soit rapide, pour ne pas perdre mon attention (ni celle de mon frère). Du coup, dans ma famille on jouait principalement à des jeux classiques, comme les Dames, les Dominos, le Puissance 4, le Backgammon, Yahtzee, Pictionnary et beaucoup aux cartes, pour la bonne et simple raison que c’était à peu près les seuls jeux qui avaient atteint la génération de mes parents et qu’ils étaient en mesure de me transmettre. La pomme ne tombant jamais loin de son arbre, vous remarquerez que la majorité des jeux cités ci-dessus sont des jeux à 2 et certains sont abstraits. J’avoue que mon éducation ludique peut sembler un peu maigre pour un geek moderne, mais elle a été suffisamment riche pour me donner le goût du jeu. Et puis je vous rassure, j’ai quand même un peu joué à Magic et beaucoup aux jeux vidéo. Finalement, c’est une chance pour moi d’avoir commencé à travailler dans la sphère ludique en ayant manqué quelques décennies d’actu car vu sous un autre angle, ça me donne beaucoup plus à découvrir. Plutôt pratique, quand on passe un week-end sur deux en festival de jeux.
Pourquoi éditeur spécialisé en jeux abstraits ?
Issu des arts graphiques, je n’étais pas destiné à être éditeur de jeu, d’ailleurs qui est vraiment destiné à devenir éditeur de jeu ? Je me le demande. Je ne savais même pas en quoi consistait ce métier, c’est la force des choses qui m’a poussé jusqu’ici. Tout a commencé il y a quelques années, quand j’ai rencontré Claude Leroy sur une terrasse de café au fin fond des Cévennes. Je le salue au passage et le remercie de m’avoir fait découvrir le monde merveilleux des algorithmes ludiques, les « ludèmes », comme il aime à les appeler. Pour celles et ceux qui se posent encore la question, un éditeur de jeu, c’est quoi ? En très très très résumé, c’est un peu comme un éditeur de livre. Ce n’est pas celui qui écrit l’histoire, mais celui qui fait tout pour que l’histoire puisse exister. L’éditeur, n’invente pas le jeu et ses mécaniques (même si certains peuvent le faire), mais il contribue à la finalisation et concrétisation du projet d’un auteur, par le choix de la thématique, la charte graphique, la production, la logistique, la stratégie de communication, les traductions, et encore mille et une choses qu’on n’imagine pas quand on vient chercher de quoi s’amuser sur Ludum. C’est donc un métier très complet, où jongler avec différentes casquettes est la base pour atteindre les objectifs qu’on s’est fixés. Ce qui me plaît et me fascine dans ce travail, c’est de pouvoir construire des objets à partir d’une matière première invisible et impalpable. Si on y pense deux minutes, les lois physiques et mathématiques qui régissent l’univers existent sans l’intelligence humaine. Nous ne faisons que tirer des conclusions de ces concepts préexistants pour les utiliser à des fins concrètes et utiles, dans une multitude de domaines différents. Pour élaborer un jeu abstrait, il faut aussi se servir et s’inspirer de ces notions afin de trouver des forces qui s’opposent et se complètent pour créer une alchimie exploitable. Il faut sans cesse innover jusqu’à trouver un mélange qui procurera la même expérience unique et renouvelable sur le plus grand nombre de joueurs. Chez Cosmoludo, un jeu, c’est forcément universel, et il n’y a pas plus universel qu’un jeu abstrait.
C’est quoi la base d’un jeu Cosmoludo ?
Le cocktail idéal d’un jeu Cosmoludo, c’est un parfait équilibre entre puissance et simplicité. Accessible et rapide à comprendre, avec des mouvements faciles et intuitifs, qui permettent de penser plusieurs coups à l’avance sans trop de difficulté. Tout ça sur un timing de 10 à 20 minutes, ni trop long, ni trop court. Voilà la base de nos jeux. Une particularité chez Cosmoludo, c’est de travailler avec une ligne éditoriale forte, des règles simples, des parties courtes, une re-jouabilité maximum et une profondeur de jeu immense. Cette ligne, si on la respecte, procure infailliblement des jeux universels, destinés autant aux joueurs invétérés qu’aux personnes qui ignorent complètement le monde ludique. Notre force, c’est de répondre à une demande formulée ou inconsciente, de stimuler son esprit avec des objets simples et malins. Notre idée est de faire passer à celles et ceux qui le désirent un moment de liberté où l’on joue, pendant une quinzaine de minutes en concentrant son énergie sur l’essentiel de ce qui se trouve devant soi. Un plateau, des pions et une mécanique. Pas besoin de thématique pour s’y retrouver, juste un univers épuré, réel et fonctionnel qui laisse place au concret. À chaque partie, c’est toujours plus ou moins la même histoire qui se dessine, mais avec à chaque fois un nouveau scénario qui évolue au fur et à mesure. À ce jour, tous nos jeux sont exclusivement 2 joueurs, mais nous travaillons sur des jeux multijoueurs pour un futur proche.
Pourquoi nos jeux ont un look si particulier ?
Dans ma première vie professionnelle, j’ai énormément travaillé sur l’abstraction visuelle à des fins de communication. Ce qu’on appelle le minimalisme. C’est l’art du dépouillement, ne garder que l’essentiel pour capter le plus vite et le plus simplement l’attention sur un message, une œuvre ou un objet. Ce concept du minimalisme correspond parfaitement avec ce que Cosmoludo propose en termes de jeux. C’est pourquoi il m’est apparu tout naturel dès le départ de prendre en charge moi-même l’aspect graphique des jeux (et de la société) pour en appliquer ce calque que je maîtrisais déjà assez bien. C’est très gratifiant de constater que les gens s’arrêtent sur notre stand car ils trouvent les jeux beaux. Et ce qui est vraiment cool, c’est qu’en réalité nos jeux ressemblent de l’extérieur à ce qu’ils sont à l’intérieur. Modernes, simples et intemporels à la fois.
Nos titres phares
Parmi les jeux qui ont fait notre succès, vous trouverez Kamon, de Bruno Cathala. C’est le jeu que nous qualifions en interne de niveau débutant, car c’est la valeur sûre qui met tout le monde d’accord. Le but du jeu, gagner ! Pas très original me direz-vous, sauf que vous avez 3 modes de victoires, que vous atteindrez plus ou moins facilement en respectant les contraintes (de couleur ou de symbole) imposées par votre adversaire. Ensuite, il y a Yoxii, de Jérémy Partinico que nous qualifions de niveau intermédiaire. Le but, avoir plus de points que son adversaire autour du Totem, lorsqu’il est complètement bloqué en fin de partie. Plus le jeu avance, plus le plateau se remplit, grâce au déplacement obligatoire du Totem, qui sert de guide pour placer les autres pièces. La sensation de jeu rappelle vaguement celle des échecs et du go, tout en étant beaucoup plus simple mais pas moins stratégique. Après vous avez Hokito, de Claude Leroy, niveau intermédiaire également. Visuellement, il ressemble un peu aux Dames, mais en réalité, rien à voir. Le but est de faire plus de points que son adversaire, en créant des piles. Sauf qu’on ne fait pas les piles comme on veut, on doit toujours atterrir sur une pièce seule, si on déplace une pièce seule et sur une pile, si on déplace une pile. Résultat, les choix se limitent de plus en plus au fur et à mesure que la partie avance. La dynamique est très intense, dès le premier coup ! Et pour finir, nous avons Mana et Pantareï, de Claude Leroy également, qui sont les 2 experts de la gamme, qu’on place plutôt au niveau expert. Dans Mana, il faut capturer le Daïmio adverse pour gagner la partie. L’originalité du jeu réside dans le déplacement des pièces qui se fait en fonction des valeurs des cases (1,2,3) et le retour en jeu des pièces capturées. Une très bonne alternative pour les débutants aux échecs. Dans Pantareï, vous devez être le premier joueur à atteindre une pile de 7 étages. Un jeu tellement minimaliste qu’il n’y a même pas de plateau. On peut l’emmener partout ! Explosif et hyper stratégique, réfléchissez bien avant d’y jouer en couple. Vous l’aurez compris, chez Cosmoludo tout le monde y trouve son bonheur. Et comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, notre petit dernier, Oxono de Jérémy Partinico, a rejoint la gamme début 2024. Niveau intermédiaire, le but est d’aligner 4 pièces de sa couleur ou 4 pièces du même symbole, verticalement ou horizontalement. Aussi surprenant qu’addictif. À découvrir aussi sur Board Game Arena.
Tom, Cosmoludo
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